
Au programme d’aujourd’hui, une lecture qui a été énormément plébiscitée l’année dernière suite à sa réédition et à la sortie de l’adaptation cinématographique – en tout cas, je l’ai énormément vu circuler sur mes réseaux de lecture : voici Le Bal des Folles, de Victoria Mas. C’est une lecture que j’avais hâte de découvrir, et que je redoutais en même temps, à cause de son sujet. Finalement, je ressors de cette lecture assez mitigée…

Entre l’asile et la prison, on mettait à la Salpêtrière ce que Paris ne savait pas gérer : les malades et les femmes.

TITRE : Le Bal des Folles
AUTEUR : Victoria Mas
ÉDITÉ PAR : Le Livre de Poche
NOMBRE DE PAGES : 240 pages
DATE DE PARUTION : 2019
GENRE : Littérature contemporaine
PRIX : 7,40€ (poche) / 6,99€ (e-book) / 18,90€ (broché)
RÉSUMÉ : 1885 : comme chaque année, à la Salpêtrière, se tient le très mondain « bal des folles ». Le temps d’une soirée, le Tout-Paris s’encanaille sur des airs de valse et de polka en compagnie de femmes déguisées en colombines, gitanes, zouaves et autres mousquetaires. Cette scène joyeuse cache une réalité sordide : ce bal « costumé et dansant » n’est rien d’autre qu’une des dernières expérimentations de Charcot, adepte de l’exposition des fous.
Dans ce livre terrible et puissant, Victoria Mas choisit de suivre le destin de ces femmes victimes d’une société masculine qui leur interdit toute déviance et les emprisonne. Parmi elles, Geneviève, dévouée corps et âme au célèbre neurologue ; Louise, abusée par son oncle ; Thérèse, une prostituée au grand cœur qui a eu le tort de pousser son souteneur dans la Seine ; Eugénie enfin qui, parce qu’elle dialogue avec les morts, est envoyée par son propre père croupir entre les murs de ce qu’il faut bien appeler une prison. Un hymne à la liberté pour toutes les femmes que le XIXe siècle a essayé de contraindre au silence.

Comme expliqué un peu plus haut, je sors de cette lecture un peu perplexe. Il n’y a pas de doute que le sujet est intéressant et très bien écrit, comme les personnages suffisamment bien développés pour que l’intrigue ait du sens. Le livre est relativement mince, à peine plus de deux cents pages, mêle histoire et fiction. Sur le papier, tout pour séduire. Mais la lecture s’est avérée beaucoup plus laborieuse qu’elle ne le laissait présager.

Impossible de dire que le Bal des Folles est un mauvais roman ; ce n’est pas le cas. Avec ses descriptions réalistes, Victoria dépeint la condition des femmes enfermées à la Salpêtrière, avec une véritable voix. Il est évident qu’elle s’est renseigné, et elle nous transporte très facilement en plein milieu du 19e siècle, alors que les femmes qui osent se rebeller et qui refusent de se soumettre sont considérés comme anormales et hystériques : où les traumatismes des femmes sont soignées à coups de compression d’ovaires et d’éther, parce qu’une femme qui se donne en spectacle de la sorte, c’est une honte pour la société, qu’il faut cacher à tout prix et abandonner.
L’intérêt du roman est avant tout historique, c’est une fenêtre sur une des nombreuses humiliations et punitions infligées aux femmes. A quelques reprises, l’écriture est saisissante d’émotions à l’évocation des horreurs infligées aux patientes. Victoria Mas nous raconte l’histoire de quatre femmes – Louise, Geneviève, Thérèse et Eugénie – enfermées dans les murs de la Salpêtrière, de gré ou de force. Elle nous raconte la lutte ou l’abandon de chacune. Parmi ces quatre personnages, deux d’entre elles se détachent plus que les autres et sont les véritables moteurs de l’intrigue à mon sens, celles qui humanisent les femmes qui sont utilisées par Charcot, diabolisées par le tout-Paris ; ce sont elles qui pointent du doigt ce désir malsain de la société de voir les malades danser, comme pour se rassurer soi-même de sa propre normalité ; c’est à cela que sont réduites ces femmes, des objets de curiosité et de dégoût, de divertissement.
Victoria Mas ne fait pas que nous raconter le quotidien des patientes de la Salpêtrière, ni que nous dresser un portrait de la société du 19e siècle ; elle nous raconte le combat d’une femme pour reconquérir sa liberté en dehors des murs de l’hôpital, son refus d’accepter les conventions dictées par la société. Toute aide – féminine, surtout… – est la bienvenue. C’est également le combat pour la compassion, l’empathie, la douceur ; que la différence ne fait pas nous des folles hystériques.

Malgré tous ces excellents points, pourtant, je reste mitigée, pour la simple raison que je ne suis pas parvenue à m’attacher aux personnages. Geneviève et Eugénie, qui ont toutes les deux le plus d’importance dans l’histoire, m’ont plu par leur construction romanesque, mais ne m’ont pas réellement touchée.
Même si le roman est bien écrit, que l’intrigue est bel et bien présente, il m’a manqué de profondeur, et d’émotions. J’ai aimé découvrir l’histoire de ces femmes, mais je ne me suis reconnue dans aucune d’entre elles. Il manquait pour moi des descriptions, de force dans le cadre et le décor, parce que je ne me suis que très peu transportée au 19e siècle. Forcément, donc, la lecture a été bien plus lente que je ne le pensais.
De même, le titre est pour moi, quelque peu trompeur. Je l’avoue, je m’attendais à ce que ce fameux Bal des Folles soit l’élément central du roman, celui autour duquel, l’intrigue se construit véritablement ; cependant, il reste très peu évoqué tout au long du roman, pour ne prendre vraiment corps que dans les vingt dernières pages du roman.

La lecture de ce roman a été pour moi en demi-teinte. J’ai grandement apprécié le sujet historique du roman, certains moments étaient pour moi réellement émouvants. Les quatre femmes dont nous suivons l’histoire sont des femmes fortes, des personnages qu’il est plaisant de lire et de découvrir. D’un point de vue purement historique, le récit est véritablement intéressant et bien construit.
En revanche, il est difficile de s’attacher émotionnellement à ces femmes ; l’écriture est efficace, quelques fois empathique mais plus souvent froide, ce qui ne facilite pas la lecture du roman. Le côté fictif est développé, mais pas suffisamment. La lecture m’a plu, j’ai aimé apprendre les éléments historiques, mais le roman dans son ensemble ne m’a pas marquée.
L’avez-vous ou prévoyez-vous de le lire ? Qu’en avez-vous pensé ?
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